dimanche 24 août 2025

C'est l'ONU qui bloque tout règlement du conflit israélo-palestinien

par Alain Legaret 

Paradoxalement, ce n’est pas la guerre de 1948 qui a figé le sort des réfugiés arabes, mais une règle administrative de l’ONU. Depuis 1949, l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine) applique une règle unique au monde, sans équivalent dans le droit international : le statut de réfugié palestinien est transmis de manière héréditaire, génération après génération. Cette exception, absente du mandat du HCR (Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés) qui gère tous les autres réfugiés du monde, a transformé une crise humanitaire en un problème politique inextricable, et contribue à la perpétuation d'un conflit israélo-palestinien.

Une inflation démographique artificielle

En 1950, l’UNRWA recensait environ 750 000 réfugiés arabes palestiniens ayant fui la guerre de 1948. En 2024, ce chiffre dépasse les 5,9 millions. Ce n’est pas le résultat de nouveaux déplacements, mais d’une règle administrative qui attribue automatiquement le statut de réfugié aux descendants, sans limite générationnelle.

Si l’ONU avait appliqué les critères du HCR, qui ne reconnaît pas les enfants de réfugiés comme réfugiés à part entière sauf cas exceptionnels , le nombre actuel serait probablement inférieur à 100 000, voire moins de 50 000. La majorité de ces personnes seraient âgées de plus de 80 ans, survivants directs des conflits de 1948 et 1967. Il n'y aurait donc aujourd'hui aucun problème israélo-palestinien.

Le précédent coréen : une crise trois fois plus grande, résolue en quelques années

La guerre de Corée (1950–1953) a déplacé plus de 2 millions de personnes, soit trois fois plus que la Nakba palestinienne. Pourtant, l’ONU n’a pas créé de statut héréditaire pour les réfugiés coréens. Elle a mis en place l’UNKRA (United Nations Korean Reconstruction Agency), une agence temporaire chargée de la reconstruction et de la réintégration.

En moins d’une décennie, les réfugiés coréens ont été intégrés dans la société sud-coréenne. Aucun coréen aujourd’hui ne revendique un droit au retour vers le Nord en tant que réfugié de guerre. Le problème a été traité, résolu, et absorbé par les institutions nationales.

Une règle qui alimente le conflit

La règle d’hérédité de l’UNRWA a eu des conséquences profondes et durables :

  • Elle maintient des millions d'Arabes palestiniens dans un statut de réfugié permanent, souvent dans des camps, sans perspective d’intégration.

  • Elle inscrit le droit au retour comme revendication centrale, rendant tout compromis diplomatique pratiquement impossible.

  • Elle empêche les pays hôtes d’intégrer les réfugiés, sous peine de légitimer l’abandon du droit au retour.

  • Elle transforme une aide humanitaire en dépendance structurelle, au lieu de favoriser l’autonomie.

L’ONU doit répondre de ses choix

Ce n’est pas un accident historique. C’est une décision politique et administrative prise par l’ONU, qui a institutionnalisé le problème au lieu de le résoudre. Contrairement à la gestion pragmatique des réfugiés coréens, l’ONU a choisi, dans le cas palestinien, de créer un mécanisme qui perpétue le conflit.

L’ONU ne peut se dérober à cette responsabilité. Elle est à l’origine d’un système qui, loin d’apaiser les tensions, les alimente depuis plus de 75 ans. Le conflit israélo-palestinien, dans sa dimension humanitaire, est aujourd’hui indissociable de cette règle. Il ne s’agit plus seulement d’un enjeu régional, mais d’un échec structurel de gouvernance internationale.

Personne ne peut résoudre un conflit dont les dés sont pipés dès le départ. L’ONU ne peut se soustraire à l’obligation de déconstruire le mécanisme qu’elle a elle-même mis en place, pour ouvrir enfin les perspectives de règlement serein du conflit qu'elle a complètement bloquées depuis trop longtemps.


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